Abrégé des Lois des Rois et des Guerres de Maïmonide

Extraits choisis et publiés par le R. Eliyahou Soloveitchik

Traduction Élie Lambert (1865)


Chapitre 1. De l’élection du Souverain

1. L’élection du roi est faite par le Sanhédrin des septante et approuvée par son chef. (Samuel, A, XV, 1)

2. Est considéré comme étranger, et ne peut être élu roi tout individu dont la mère n’est point israélite. (Deutéronome, XVII, 15.)

3. Les femmes sont exclues du trône. (Ibid.)

4. Ne peut être élu roi ou grand-pontife un homme qui a exercé auparavant une fonction vile, dont le souvenir nuirait à la majesté royale ou à la dignité du sacerdoce. (Isaïe, XXXIII, 17.)

5. Le sacre du roi a lieu au moyen de la sainte onction. (Samuel, A, X, 1.)

6. L’élection consommée, la royauté devient héréditaire, par ordre de primogéniture, même en faveur des mineurs. (Deutéronome, XVII, 20.)

7. De même toute fonction, tout emploi est héréditaire lorsque le fils remplit complètement les conditions exigées pour l’exercice de la fonction. (Samuel, B, VII, 16.)

8. L’hérédité royale (et à plus forte raison celle des autres fonctions) cesse lorsque l’héritier du trône n’a pas les qualités requises pour régner. (Psaumes CXXXII, 12.)

9. Le sacre n’a lieu que pour un chef de dynastie. (Histoire de Saul et de David.)

10. Il a lieu également en faveur d’un héritier direct du trône lorsqu’il s’élève un compétiteur. (Histoire de Salomon.)

Chapitre II. Du Respect dû au Souverain.

1. Il est dû par chacun au souverain, déférence respect et soumission. (Deutéronome, XVII, 15.)

2. Tout ce qui a appartenu au roi : attelage, trône, sceptre, couronne, vêtements, ornements, ne peut passer à l’usage d’un particulier. (Ibid.)

3. Les esclaves ou les domestiques du roi ne peuvent passer au service d’un particulier. (Ibid.)

4. La veuve du roi ne peut convoler en secondes noces. (Ibid.)

5. Le roi ne peut paraître devant ses sujets dans un état ou dans une tenue contraires à la majesté royale. (Isaïe, XXXIII, 17.)

6. Le roi ne peut être soumis à la cérémonie du lévirat, en cas de mort d’un frère laissant une veuve sans enfants ; la cérémonie ne peut avoir lieu, même de son plein gré, car le roi ne peut abandonner les prérogatives de sa dignité (Deutéronome, XXV, 9.)

7. En cas de mort du roi sans postérité, sa veuve n’est pas soumise à la cérémonie du lévirat. (Ibid.)

8. En cas de décès d’un membre de sa famille, le roi ne dépasse pas le seuil du palais au convoi funèbre, et, lorsqu’on lui présente le premier repas de deuil, toute la cour s’assoit sur le sol, et le roi prend place sur un siège. (Hist. de David.)

9. Les Rois descendant de David jouissent du privilège spécial de se tenir assis dans le Temple de Jérusalem. (Samuel B, VII, 18.)

10. Lorsque le roi donne audience, il doit être assis sur son trône et revêtu de tous ses ornements royaux. (Isaïe, XXIII. 17.)

11. Quiconque est reçu en audience royale, même un prophète, doit se courber jusqu’à terre, en se présentant devant le roi. (Rois, A, 1, 23.)

12. Le grand-pontife est dispensé de ces marques d’humilité quand il est dans l’exercice de ses fonctions. Hors ce cas, il doit les mêmes marques de déférence au souverain. (Nombres, XXVII, 2.)

13. Il est du devoir du roi d’honorer les lettrés, et, lorsqu’il reçoit le Sanhédrin ou des savants, il se lève à leur entrée et les autorise à s’asseoir auprès de lui. (Histoire d’Assa, roi de Juda.)

14. Néanmoins, en audience publique, le roi ne va au-devant de personne et n’adresse à aucun des paroles familières. (Ibid.)

15. En retour des marques de respect que chacun est tenu de témoigner au souverain, le roi doit être doux, affable, et s’interdire tout sentiment d’orgueil à l’égard du peuple. Il doit accueillir avec bonté les plus humbles de ses sujets, s’occuper constamment des besoins du peuple dans leurs moindres détails, et ménager la dignité des plus petits de la nation. (Psaumes CVIII, 22. — Deutéronome, XVII, 20.)

16. Lorsque le roi s’adresse au peuple en général, son langage doit être empreint de modestie et de condescendance. (Rois, A, XII, 7.)

17. Le roi doit toujours témoigner une grande réserve, savoir supporter les critiques, voire même les représentations du peuple, et se rappeler que le titre que lui donne la religion c’est celui de pasteur d’Israël. (Exode, XVI, 8. — Psaumes, LXXVIII, 71. — Isaïe, XL, 11.)

Chapitre III. Des prérogatives et des devoirs du Roi.

1. Le roi est tenu de copier le Pentateuque au moins une fois et de le collationner avec l’aide du Sanhédrin des septante. (Deutéronome, XVII, 18.)

2. Il est encore astreint à en copier un deuxième exemplaire, si celui qu’il a écrit est le seul qu’il possède. Un de ces exemplaires reste dans sa bibliothèque ; le second l’accompagne en tout lieu, à ses audiences comme sur le champ de bataille ; car il doit en faire sa lecture continuelle. (Deutéronome, XVII, 19.)

3. Il ne doit point avoir un grand nombre de femmes. (Deutéronome, XVII, 17.)

4. Il ne peut avoir dans ses écuries un nombre de chevaux plus grand qu’il n’est nécessaire à son équipage. (Deutéronome, XVII, 16.)

5. Sa liste civile ne peut comprendre que les sommes indispensables à l’entretien de sa maison. Il ne peut faire des économies sur ses revenus. (Cet article ne comprend pas les revenus du budget public). (Deutéronome, XVII, 17.)

6. Il ne doit pas faire un usage immodéré du vin, afin de tenir toujours son esprit en état de veiller aux besoins du peuple. (Proverbes, XXXI, 4.)

7. Le roi doit s’abstenir d’un trop fréquent commerce avec les femmes, et se mettre en ce point au-dessus du vulgaire. (Proverbes, XXX, 3.)

8. Le roi ne juge pas et ne peut être mis en jugement ; il ne peut être témoin et on ne peut témoigner contre lui. (Décision du Sanhédrin.)

9. Le roi a droit de vie et de mort à l’égard de ceux qui s’insurgent contre son gouvernement. (Josué, 1. 18.)

10. La décapitation est le seul genre de supplice qui puisse être appliqué aux condamnés à mort pour insurrection contre le gouvernement. (Jugement du Séméi.)

11. Le roi peut faire emprisonner ou flageller pour outrage à sa personne ; mais il ne peut condamner à la confiscation des biens, même partielle (Interprétation du précepte : « Tu ne déroberas point. »)

12. En cas de contradiction entre un édit du roi et un précepte divin, nul ne peut être condamné pour inexécution de l’ordre royal, en vertu de l’axiome : Le maître a le pas sur son serviteur.

13. Il appartient au gouvernement de faire diriger des poursuites contre toute autorité qui aura appliqué la peine capitale lorsqu’il n’y aura pas eu preuves convaincantes, lorsque l’accusé n’aura pas connu la peine à laquelle il s’exposait, lorsqu’il n’y aura pas eu nombre et qualité suffisants de témoins oculaires, si l’accusé quoiqu’ennemi de la victime, ne l’a pas tuée par méchanceté. (Exode XXIII. 7.)

Chapitre IV. Des Impôts.

1. Le gouvernement peut lever des impôts ou ordonner des corvées pour les besoins ordinaires du pays ; il peut imposer des décimes supplémentaires en temps de guerre. Nul ne peut se soustraire aux impôts établis. (Samuel A, VIII, 17. — Deutéronome, XX, 11.)

2. Il lève des troupes indigènes pour la défense du pays et pour sa sécurité personnelle. (Samuel A, VIII, 11.)

3. Il peut de même lever des ouvriers pour les travaux du gouvernement moyennant salaire, et mettre à réquisition, en cas de besoin, des équipages et bêtes de somme, moyennant loyer. (Samuel A, VIII, 16 ibid. — v. 12.)

4. Le roi choisit ses femmes parmi les filles d’Israël. (Samuel A, VIII, 13.)

5. Au roi appartient la nomination des officiers militaires de tout grade. (Samuel, A, VIII, 12.)

6. En cas de guerre, le gouvernement peut faire des réquisitions de vivres, moyennant paiement, pour l’entretien des troupes de guerre. (Samuel A, VIII, 14.)

7. La 13e partie des biens immobiliers conquis sur l’ennemi appartient au gouvernement

8. Les biens des suppliciés pour crime politique peuvent être confisqués au profit de l’État.

9. En cas de conquête les trésors publics pris à l’ennemi appartiennent à l’État. Les autres objets mobiliers sont moitié attribués à l’État, moitié à l’armée de guerre, sans distinction de combattants et d’armée de réserve. (Samuel, A, XXX, 24.)

10. Les pays conquis appartiennent à l’État.

11. Dans toutes ces mesures, le gouvernement ne doit se guider que par l’équité et la droiture, car l’autorité du souverain n’est établie que pour assurer le règne du droit et de la justice. (Samuel A, VIII, 20.)

Chapitre V. De la guerre et de l’émigration.

1. Il y a deux sortes de guerres : les guerres nécessaires et les expéditions volontaires. Les premières pour la défense du territoire national, les autres en vue d’extension des frontières.

2. Dans le premier cas, le roi entre en campagne de sa propre autorité ; dans le second, il lui faut l’assentiment du Sanhédrin.

3. En cas de guerre, le souverain peut faire tels travaux d’attaque ou de défense qu’il juge utiles, même au préjudice d’intérêts particuliers ; mais il ne peut modifier la direction normale de ces travaux dans l’unique vue de ménager les propriétés d’un individu aux dépens de celles d’un autre.

4. Les pays conquis avec l’assentiment du Sanhédrin peuvent être annexés au territoire national.

5. On ne doit pas quitter définitivement sa patrie sans l’esprit de retour, et temporairement que pour des besoins intellectuels, commerciaux ou d’autres motifs graves. (Deutéronome, XVII, 16.)

6. Les patriotes en Israël avaient l’usage de baiser la lisière du sol natal lorsqu’ils repassaient la frontière. (Psaumes, CII, 15.)

7. Il vaut mieux habiter dans sa patrie une ville peuplée d’étrangers que de demeurer hors de sa patrie dans un lieu peuplé même de coreligionnaires. (Samuel, A, XXVI, 19.)

8. De même les israélites exilés de la Terre-Sainte doivent préférer leur patrie adoptive à tout autre pays. (Jérémie XXVII, 22.)

Chapitre VI. De la déclaration de guerre et des sièges.

1. On ne peut attaquer un ennemi quelconque sans l’avoir préalablement invité à une conférence pour régler de la paix. (Deutéronome, XX, 10.)

2. Les conditions de la paix sont invariablement au nombre de deux : 1ère condition morale: l’acceptation par l’ennemi des sept préceptes de morale générale dictés par Dieu à Noé. (1er Abstention du meurtre ; 2e de la débauche ; 3e du vol ; 4e de l’idolâtrie matérielle ; 5e du blasphème ; 6e de la cruauté à l’égard des animaux ; 7e établissement de tribunaux impartiaux.) 2e condition pécuniaire: une imposition de guerre. (Rois A, IX, 15.)

3. Les conditions acceptées, nul ennemi ne peut être mis à mort. (Deutéronome, XX, 2.)

4. L’alliance contractée avec l’ennemi doit être religieusement observée, et il est interdit d’équivoquer sur le traité de paix.

5. En cas de sac d’une ville par suite de guerre, il est interdit de tuer une femme ou un enfant. (Deutéronome, xx, 14.)

6. Ces préliminaires de paix étaient commandés même à l’égard des peuples Chananéens que les Israélites devaient déposséder, et à l’égard d’Amalec auquel ils avaient juré une guerre d’extermination ; car ce serment ne devait avoir d’effet qu’autant que les conditions ci-dessus seraient refusées. (Josué, XI, 19.)

7. Josué a adressé trois proclamations à l’ennemi avant d’entreprendre la conquête du pays de Chanaan, Il déclarait par la première que tout ennemi qui émigrerait avant la guerre ne serait moins inquiété. Par la seconde, qu’il était disposé à entrer en pourparlers de paix avec les peuples qui accepteraient les conditions sus-mentionnées ; par la troisième, il invitait loyalement l’ennemi à se préparer à la guerre.

8. D’après ce qui précède, il y aurait peut-être lieu de se demander pourquoi les habitants de Gabaon, au lieu d’user d’artifice, n’ont pas traité directement de la paix avec Josué. Mais il faut observer que les Gabaonites ne connaissaient point les préliminaires de paix imposés aux israélites avant toute déclaration de guerre, et, frappés de terreur, ils ont voulu prendre les devants.

9. Pourquoi donc, dans ce cas, les chefs de tribus, après avoir été désabusés au sujet des Gabaonites ont-ils été si profondément affligés de la promesse par serment qu’ils leur avaient donnée ? C’est que ce serment les liait aux Gabaonites, par une véritable alliance, et que hors des conditions de paix déterminées plus haut, les israélites ne pouvaient contracter alliance avec les sept peuples Chananéens. Toutefois, bien que l’alliance contractée n’ait été obtenue qu’à l’aide d’un mensonge, les israélites crurent de leur honneur de conserver religieusement la parole donnée. (Deutéronome, VII, 2.)

10. À l’égard de tout étranger, la Thorah dit : « Il » pourra demeurer librement dans ton pays, partout où il se plaira, tu te garderas de le contrarier, » (Deutéronome, XXIII, 17.) Mais les Ammonites et les Moabites, étaient exclus du bénéfice de cette prescription. (Deutéronome, XXII, 7), et par suite de cette restriction, on ne commençait pas, en cas de guerre, à proposer la paix à ces deux peuples. Néanmoins les premières propositions venaient de leur côté, elles devaient être accueillies. (Deutéronome, XX, 10.)

11. En cas de siège, on ne peut investir une ville complètement ; mais il faut laisser à l’ennemi une route libre par laquelle il puisse s’échapper et sauver sa vie. (Nombres XXXI, 7.)

12. Il n’est pas permis de détruire sans nécessité absolue des arbres fruitiers en plein rapport, même dans un but de stratégie. Il n’est pas non plus permis de détourner les cours d’eau qui traversent la ville assiégée. (Deutéronome, XXX, 19.)

13. Le principe précédent a été appliqué à toute destruction inutile. C’est donc contrevenir à cette défense que de briser sans nécessité des ustensiles, de démolir des constructions utiles, de boucher des sources, de gâter des aliments, etc.

14. On peut combattre et faire un siège, même le jour du Sabbath. (Deutéronome, XX, 20.)

15. Le combattant qui tombe au champ d’honneur a droit par sa mort à la place où il est tombé. Ce terrain lui est acquis, et lui sert de sépulture.

16. Les camps jouissent de toutes les franchises religieuses accordées aux propriétés privées.

17. Des mesures d’hygiène rigoureuses doivent être observées dans les camps ; des lieux spéciaux en dehors du camp sont exclusivement affectés aux nécessités naturelles, et toute impureté est immédiatement enfouie et soigneusement recouverte de terre. Chaque militaire doit à cet effet être muni d’une pelle qui fait partie de son armement. (Deutéronome, XXIII, 13, 14, 15.)

Chapitre VII. Des cas de dispense du service militaire.

1. En cas de guerre, on désigne un pontife spécial, chargé de haranguer l’armée au moment de la bataille. Ce pontife est sacré par l’huile sainte, et prend le nom de pontife spécial de la milice.

2. Le pontife spécial harangue deux fois l’armée : une, au moment de passer la frontière ; il invite ceux qui se trouvent dans les cas de dispense prévus par la Loi, à en profiter, et à retourner dans leurs foyers. La seconde fois, au moment où l’action va s’engager, il adjure l’armée de se montrer ferme et courageuse. (Deutéronome, XX, 6.)

3. Au moment où l’armée va s’ébranler pour le combat, le pontife spécial se place sur un point culminant, et, s’adressant au peuple, il s’écrie en hébreu: « Fils d’Israël, vous voilà sur le point de livrer bataille à vos ennemis, courage ! éloignez de votre cœur toute pusillanimité, toute faiblesse, toute crainte, toute anxiété ; vous êtes tous sous la sauvegarde de Dieu qui fera triompher votre cause. » Un autre pontife répète ces paroles à haute voix dans les rangs. Le pontife spécial reprend ensuite la parole, et invite de nouveau ceux qui se trouvent dans les cas de dispense légale à quitter l’armée avant le combat. Les commissaires de guerre répètent ces paroles dans les rangs. (Deutéronome, XX, 3.)

4. Après cette proclamation, les commissaires de guerre invitent encore à se retirer ceux qui témoignent de la crainte ou qui doutent du succès. (Deutéronome, XX, 8.)

5. Ces préliminaires terminés, on dispose les bataillons, et l’on donne à chaque officier son poste. On place ensuite derrière chaque corps d’armée, une arrière-garde d’élite munie de haches, avec ordre de couper les jarrets à tout fuyard. (Ibid.)

6. Les cas de dispense ci-dessus énoncés ne s’appliquent qu’à une guerre extérieure ; mais en cas d’envahissement du territoire national, toute dispense cesse, et nul ne peut se soustraire au service militaire.

7. Ceux qui profitent d’un cas de dispense pour se soustraire au service militaire, n’en sont pas moins tenus de contribuer pour leur part aux frais de la guerre et aux corvées.

8. Les nouveaux propriétaires d’immeubles et les nouveaux mariés sont exonérés pour un an de toute imposition. (Deutéronome, XXIV, 5.)

9. Le combat engagé, il ne faut plus songer qu’à Dieu dont dépend la victoire, ne pas craindre d’exposer sa vie, se soustraire à toute inquiétude, et ne plus songer à femme ni enfants ; mais le combattant doit se rappeler qu’il tient en mains la destinée d’Israël, qu’il est responsable à l’égard de la nation de l’issue du combat, responsable du sang versé inutilement dans la guerre, et que la vie éternelle est là pour récompenser celui qui s’est dévoué pour la patrie. (Jérémie, XLVIIIl, 10, 22. — Samuel A, XXV, 30.)

Chapitre VIII. Du mariage avec des captives.

1. Les armées qui se trouvent hors du territoire national, sont autorisées, en cas d’absolue nécessité, à se nourrir de mets interdits d’ordinaire par la religion. (Deutéronome, VI, 11.)

2. Quiconque a pris maritalement une captive, ne peut la délaisser, mais doit la recueillir dans sa maison à titre d’épouse. (Deutéronome, XXI, 11.)

3. Néanmoins, on ne peut épouser ainsi une étrangère qu’en temps de guerre. (Ibid.)

4. Toute violence est interdite à l’égard des captives. (Deutéronome, XXI, 12.)

5. Si la captive demande à embrasser le Judaïsme, elle se purifie par l’eau, et son mariage est soumis au droit commun. Si elle ne consent pas tout d’abord à entrer dans la religion juive, il lui est accordé un délai de 30 jours pour se déterminer. (Deutéronome, xxi, 13.) Si, le mois écoulé, elle répond affirmativement, elle demeure fiancée pendant deux autres mois, puis se marie.

6. Si le maître lui-même, après le délai d’un mois, changeait de résolution, et qu’il ne veuille plus en faire sa femme, il doit, pour cette injure, lui rendre la liberté ; s’il la vendait comme esclave, le marché serait nul. (Deutéronome, XXI, 14.)

7. Si, au bout du premier mois, la captive a persisté dans son refus, on lui accorde une année entière de réflexion. Après ce délai, elle peut encore refuser le mariage, mais à la condition d’accepter l’observance des sept préceptes des Noachides (Voir ch. vi, 2.) ; elle est mise alors en liberté et peut s’établir dans le pays à titre d’étranger immigrant. (Ibid.)

8. Moïse n’a donné la Thorah qu’aux Israélites. Les étrangers ont droit d’embrasser le Judaïsme, mais il n’est pas permis de les y contraindre. (Deutéronome, XXXIII, 4 et XV, 15.)

9. Tout étranger qui observe, par crainte de Dieu, les préceptes des Noachides, est nommé pieux enfant de la nature, et à part au monde futur ; s’il les observe par instinct, c’est un philosophe.

Chapitre IX. De la religion naturelle.

1. Adam n’a reçu que six préceptes: 1er défense de l’idolâtrie ; 2e du blasphème ; 3e du meurtre ; 4e de la débauche ; 5e du vol ; 6e ordre de pratiquer la justice.

2. Noé a reçu un septième précepte: Interdiction de la cruauté à l’égard des animaux. (Genèse, IX, 4.)

3. Abraham a reçu un huitième précepte: la circoncision. C’est à lui aussi qu’on rapporte l’institution de la prière du matin.

4. Isaac a institué la dîme des pauvres et la prière de l’après-midi.

5. Jacob a défendu de manger les veines qui se trouvent dans l’arrière-train des animaux, et a institué la prière du soir.

6. Amram, père de Moïse, a ajouté plusieurs préceptes aux précédents, et la Thorah a été complétée par Moïse.

7. Les étrangers qui se trouvent sous la domination juive, ne peuvent être astreints qu’à l’observance des 7 préceptes de Noé.

8. Par le premier précepte, l’idolâtrie, on entend le culte de la matière.

9. Par le deuxième précepte, le blasphème, est prohibé l’outrage intentionnel au Dieu suprême.

10. Par le troisième précepte, le meurtre, sont punis également l’avortement, l’homicide par privation de nourriture ou la complicité tacite de l’homme qui peut empêcher un crime et le laisse s’accomplir.

11. Dans le quatrième précepte, rentrent l’inceste et les péchés contre nature.

12. Par le cinquième précepte, le vol, sont encore interdits le rapt, l’abus de pouvoir et l’abus de confiance.

13. En vertu du sixième précepte, il est interdit de se nourrir de chair qui aurait été retranchée du corps d’un animal dont la vie n’était pas complètement éteinte.

14. Le septième précepte prescrit la justice, c’est-à-dire l’établissement dans chaque cité de juges indépendants, chargés de punir les infractions aux règles précitées.

Chapitre X. Règles de droit à l’égard des étrangers.

1. L’étranger qui commet un acte réputé crime ou délit, sans avoir eu la volonté de nuire, n’est pas punissable. Néanmoins, en cas d’homicide, si le plus proche parent de la victime a, dans un premier mouvement, usé de représailles, il peut être déclaré excusable.

2. L’étranger ne peut se prévaloir de son ignorance de la Loi, lorsqu’il s’agit d’un principe de morale universelle.

3. Un étranger qui a péché sous l’empire d’une force majeure n’est point punissable. Un enfant, un sourd-muet ou un fou ne sont jamais justiciables.

4. Un enfant converti au judaïsme peut, à l’âge de raison, renoncer à la religion israélite et réclamer sa qualité d’étranger.

5. Un étranger qui a blessé un Israélite, ne peut être condamné à mort, si la mort ne s’en est pas suivie.

6. Les juges peuvent condamner à la flagellation ou à l’amende, les auteurs d’une secte nouvelle ; mais ce ne peut être un motif de condamnation capitale.

7. Les étrangers sont autorisés à offrir des sacrifices au Temple ; on accepte également leurs aumônes, en faveur des pauvres, et on y fait participer les pauvres de tous les cultes.

8. Les tribunaux israélites sont tenus de juger également les procès des non-israélites sur la demande des parties.

9. La charité publique doit pourvoir aux besoins des étrangers domiciliés dans le pays d’Israël, et l’on ne doit faire, dans l’exercice des œuvres de miséricorde, aucune distinction entre Israélites et étrangers, soit envers les pauvres, soit envers les malades, soit envers les morts. (Psaumes, CXLV, 9.)

Chapitre XI. Du Messie.

1. Le but du Messie est le rétablissement d’une nationalité juive. (Deutéronome, XXX, 3, 4. Nombres, XXIV, 17.)

2. Le Messie, n’ayant qu’une mission politique, ne fera ni miracles ni choses surnaturelles.

3. Il n’y aura donc moyen de reconnaître le Messie que par sa vertu, sa piété et par la réussite de son œuvre. (Daniel, XI, 35.)

4. Quant aux faux messies, la véritable preuve de leur artifice c’est leur chute. (Daniel, XI, 14.)

5. Les desseins de la Providence sont au-dessus de la conception humaine, et tous les événements concourent nécessairement à l’accomplissement des vues divines. (Stéphanie, III, 9.)

6. C’est ainsi que tous les événements historiques1 ont contribué jusqu’ici à répandre dans tout l’univers les principes de la religion et de la vraie morale, et la venue du Messie fera disparaître les dernières incertitudes qui s’élèvent encore sur les vrais principes qui doivent guider l’humanité.

Chapitre XII. Des temps Messianiques.

1. Ce serait une grave erreur que de supposer que dans les temps messianiques, la nature changera en quoi que ce soit, et de prendre à la lettre cette prophétie : Le loup vivra avec l’agneau, le tigre reposera avec le chevreau. » (Isaïe, x1, 6.) Ce n’est qu’une allégorie pour peindre la concorde qui règnera entre tous les peuples.

2. Il n’y aura donc de différence entre nos temps et ceux du Messie qu’une liberté générale.

3. Il résulte des paroles des prophètes que cette ère de concorde n’arrivera qu’à la suite de grandes guerres, et que le premier chef d’Israël qui surgira n’aura d’autre mission que d’établir l’harmonie universelle. (Malachie, III, 23.)

4. C’est une occupation futile que de vouloir déduire des versets bibliques les évènements de cette époque messianiques, car les déductions sont toujours libres, et chacun en tire les conséquences favorables à ses opinions.

5. Les prophètes et les sages ont aspiré après les temps messianiques, non pas pour voir Israël devenir l’arbitre du monde, ou jouir d’honneurs éclatants ou de faveurs matérielles, mais seulement pour avoir la liberté de pratiquer librement la religion et voir régner partout l’abondance, la paix, le bonheur et la science du vrai. (Isaïe, XI, 9.)


1Le Christ, Mahomet.

Moses Maimonides Hilchath melachim : renfermant les lois concernant les rois et la guerre. Publié en hébreu par Elias Soloweyzick. Traduit par Élie Lambert. Metz (Imprimerie de J. Mayer), 1865. [Version numérisée : Google].

Retour en haut