Yoré Déa | יורה דעה
Des vins destinés aux idoles | הלכות יין נסך
De l’idolâtrie | הלכות עבודת כוכבים
R. Abel Neviasky (1910)
Introduction du traducteur
J’ai réuni dans le présent volume deux traités : 1° Du vin d’un païen ; 2° De l’idolâtrie et des idolâtres. Ces deux traités ayant beaucoup de rapports l’un avec l’autre, il m’a semblé inutile de les faire imprimer en deux fascicules différents.
Les lois relatives au vin offert aux idoles sont de source biblique. On lit en effet dans le Talmud (traité Aboda Zara, page 29b) : יין מנלן אמר רבה בר אבוה אמר קרא אשר חלב זבחימו יאכלו ישתו יין נסיכם « Comment savons-nous que le vin offert aux idoles est l’objet d’une défense biblique ? C’est parce qu’on lit dans le Deutéronome XXXII : ‘‘Lorsqu’ils mangeaient la graisse de leurs sacrifices et qu’ils buvaient le vin de leurs aspersions’’. » Et un Docteur du Talmud dit : מה זבח אסור בהנאה אף יין נמי אסור בהנאה « comme il est interdit de tirer profit de leurs sacrifices, il est également défendu de tirer profit de leurs vins qui ont servi au culte de l’idolâtrie. »
L’interdiction du vin qui a servi au culte païen étant de source biblique, les docteurs du Talmud et le Rituel du Judaïsme ont rigoureusement défendu tout vin païen dont on ignore la destination, même s’il est mêlé avec un vin permis ou tout autre liquide.
De même, devient interdit, tout vin touché par un païen, parce qu’on ne connaît pas la raison pour laquelle il l’a touché. Lorsqu’il s’agit d’une défense biblique, la loi traditionnelle recommande la plus: grande sévérité, même quand il y a doute; aussi l’auteur du Rituel n’a-t-il pas craint d’écrire 17 chapitres relatifs au vin d’un païen, afin de s’exprimer aussi clairement que possible. V. §§ 123 et 124.
Est également défendu un vin païen mêlé avec un autre, ou un vin israélite ayant été en contact avec un vin qui a servi au culte païen. V. §§ 125 et 126. Puis sont examinées les questions suivantes : Si l’on peut ajouter foi à la déclaration d’un témoin disant que le vin d’une personne a servi au culte idolâtre. V. § 127. Du cas où un païen séjourne dans un lieu où se trouve le vin d’un Israélite. V. §§ 128 et 129. Peut-on confier à un païen la mission de transporter le vin d’un Israélite d’une place à une autre ? Un Israélite peut-il prendre un païen comme aide dans la fabrication de son vin ? V. §§ 130 et 131. Est-il permis à un Israélite d’accepter une indemnité d’un païen qui a rendu interdit, en le touchant, un vin israélite ? V. §§ 152 et 133. Mélange du vin permis et du vin défendu ;vases -qui ont contenu du vin païen. V. §§ 134 et 135. De l’envoi par un païen, d’un vase destiné à contenir du vin; du cas où l’on a versé du vin permis dans un vase qui a contenu du vin défendu. V. §§ 136, 137 et 138.
Je l’ai déjà dit, et je le répète, le but de ma traduction est de montrer à tous que les lois juives ne sont ni despotiques ni inquisitoriales ; qu’elles ne sont autre chose que de sages prescriptions faites pour assurer le bonheur matériel et moral de ceux qui les observent. (Deutéronome, IV, 40.) « Garde ces statuts et ces commandements que je te prescris aujourd’hui afin que tu sois heureux, toi et tes enfants après toi ; afin que tu prolonges tes jours sur la terre que le Seigneur ton Dieu te donne pour toujours. » Moïse nous ordonne de comprendre Dieu. V. même chapitre 35 :« Tu as besoin de connaître (ou de comprendre par toi-même) l’existence de Dieu.» Il n’emploie même jamais le verbe croire, mais ידע connaître ou comprendre et parfois זכר se souvenir ou penser.
J’ajouterai que toutes les lois relatives au vin destiné aux idoles ne sont plus applicables de nos jours et dans nos pays, où le paganisme a disparu. Toutes les religions des pays civilisés étant devenues monothéistes, ces lois n’ont d’autre intérêt que celui de lois périmées qui, en des temps antérieurs, furent, à juste titre, strictement observées.
D’ailleurs il faut remarquer que, même pour époque où le paganisme était à son apogée, l’auteur dit : «le vin touché par mégarde par un païen qui ne pratique pas le polythéisme est permis. » Si l’on me demande pourquoi cet auteur (le célèbre Rabbin Joseph Caro, qui vécut en Espagne de 1488 à 1579), en constituant le Rituel d’après le Talmud, n’a pas mentionné que ces lois contre l’idolâtrie ne s’appliquaient pas à son époque, je répondrai :Caro ne pouvait pas songer que des esprits mauvais par système pourraient exiger une semblable déclaration. D’ailleurs les matériaux du Talmud de Babylone, dans lequel Joseph Garo a puisé, sont antérieurs à l’apparition du Christianisme. C’est ainsi que le Talmud rapporte le jugement porté par Hillel et Chamai sur Hérode.
Bien d’autres lois ne sont plus applicables de nos jours, par exemple celles relatives aux prémices, à la greffe, à la primogéniture de l’homme, aux prémices du bétail, aux dimes, parce que nous ne sommes plus un peuple d’agriculteurs et que nous n’avons plus le Temple, ni les prêtres. Et cependant ces lois sont étudiées dans leurs moindres détails.
L’interdiction d’un vin touché par un païen, ou d’un vin permis qui a été en contact avec un vin défendu est traditionnelle et faite pour éviter entre les païens et les Israélites une intimité qui pourrait amener entre eux des mariages (défense biblique).
Quant aux mariages mixtes de nos jours, je m’étonne que les parents non-juifs ne suivent pas la règle des Israélites et ne les interdisent pas. L’union de deux êtres est chose fort délicate et il y a toujours à craindre que des divergences dans la foi et dans la manière de vivre n’amènent la discorde entre les époux.
Le traité VIII De l’Idolâtrie, étudie les questions ci-après : des objets servant au culte des idoles, à son embellissement et à ses holocaustes ; des holocaustes ou des objets servant au culte de l’idolâtrie, qui ont été mêlés avec d’autres objets. V. §§ 139 et 140 ; de interdiction à un Israélite de tirer profit des images ou des figures représentant des idoles. V. §§141 et 142. S’il est permis de construire une maison auprès d’un temple dédié aux idoles, et s’il est permis à un Israélite d’accepter l’argent provenant de la vente des idoles. V. §§143 et 144. S’il est permis de faire le commerce d’objets fournis par la nature, et qui, par la suite, servent d’idoles ou d’objets servant aux idoles et déformés par un païen, si un Israélite peut refuser, après paiement, une idole trouvée dans de la ferraille achetée à un païen. V. §§ 145 et 146. Ce traité examine ensuite s’il est permis à un Israélite de jurer devant un faux dieu ou de faire prêter serment à un païen devant son idole ; si l’Israélite peut accepter un cadeau envoyé par un païen au moment d’une fête païenne. V. §§ 147 et 148. Si l’Israélite peut être en relations commerciales avec l’idolâtre, au moment où celui-ci se prépare à se rendre à une foire instituée en l’honneur de son faux dieu ; s’il est permis à un Israélite d’aller seul à cette foire, d’y faire des achats, de boire dans un bassin dont l’eau réfléchit l’image d’une idole. V. §§ 149 et 150. L’auteur répond enfin à ces questions : L’Israélite peut-il vendre à un païen un objet susceptible de servir au culte des faux dieux ? Peut-il s’attabler et manger avec un païen ? V. §§ 151 et 152. Peut-il laisser un animal dans une auberge païenne ou le faire garder par un berger idolâtre? A-t-il le droit de prendre une sage-femme païenne ? V. §§ 153 et 154. De se faire soigner par un médecin païen, de se laisser couper les cheveux par un coiffeur idolâtre. V. §§ 155 et 156 ? Le chapitre 157 s’occupe de la conduite à tenir par l’Israélite lorsqu’un païen veut lui faire embrasser le culte idolâtre, ou lui ordonne de violer une personne ou de se livrer sur elle à des outrages, en lui laissant le choix entre mourir ou. commettre ce crime.Le chapitre 158 traite si l’Israélite peut sauver un juif idolâtre de la mort.
Rituel du judaïsme. Traduit pour la première fois sur l’original chaldéo-rabbinique et accompagné de notes et remarques de tous les commentateurs, par M. A. Neviasky. Septième traité : Des vins destinés aux idoles. Paris, 1910. [Version numérisée : archive.org].